Annie Chalon-Blanc

Annie Chalon-Blanc

Rencontres avec Pierre Gréco

Pierre Gréco est mort le 30 novembre 1988. Ce texte lui est dédié. Certains passages sont tirés d'un article paru dans le livre de D. Gilis en 2008. Ce texte a été remanié pour le rendre plus personnel. Bonne lecture et merci de votre visite.

 

 

 

 

 

Rencontres avec Pierre Gréco 

 

 

Notre première rencontre date de 1970. Gréco donnait un cours sur Wallon à l’Institut de Psychologie, rue Serpente. Il s’agitait sur l’estrade de la salle 33, associant avec brio à la pensée par couples chez Wallon : la musique, la littérature, les faits politiques, et de nombreuses boutades. À cette époque, il ne m’a pas enthousiasmée alors qu’il charmait tous mes camarades. Je l’ai trouvé plus érudit que pédagogue. J’étais en même temps l’étudiante de René Zazzo qui était, lui, un très grand pédagogue. J’ai rapidement délaissé le boute en train de la salle 33. Toutefois, deux anecdotes relatives à ce premier contact m’ont particulièrement marquée. Un soir où j’allais écouter ce virtuose de la parole, je suis arrivée en retard avec une étagère en bois dans les bras, Gréco a aussitôt cessé de tourbillonner pour m’apostropher : « Bonsoir Mademoiselle Sarah Bernhardt, je constate que vous vous promenez toujours avec votre cercueil ! » Toute la salle a ri, et moi aussi. Je n’ai pas osé lui rétorquer que je n’avais pas encore de jambe de bois. Un autre soir, je l’ai aperçu dans le hall de la rue Serpente. Il conversait avec Hélène Gratiot-Alphandéry et son visage avait une expression tellement différente de celle qu’il donnait en spectacle que cela m’a intriguée. C’était une belle expression, extrêmement profonde.

 

C’est en avril 1975 que je l’ai retrouvé sur le conseil d’une de mes collègues de Nanterre. Selon elle, il fallait aller chez Gérard Vergnaud et Pierre Gréco pour faire réellement de la psychologie de l’enfant. Forte de mon expérience passée, je suis d’abord entrée dans le bureau de Vergnaud qui m’a demandé si je souhaitais choisir Pierre Gréco comme directeur de thèse. Je lui ai vivement répondu que j’aimais autant travailler avec lui. Mais j’assistais chaque mardi au séminaire de Pierre. Là, il ne donnait plus un cours, il faisait des critiques fort intéressantes et devenait un homme très écoutable. Toujours agité, il enroulait un cache-col bleu marine à son cou, se déplaçait en tourbillonnant, gonflait sa joue avec sa langue quand il se taisait. Ses mains aux doigts jaunis pirouettaient à l’italienne, ses gauloises bleues se succédaient avec un total dédain à l’égard de sa santé et de celle de l’auditoire.

J’observais tout et j’écoutais, enfin j’essayais d’écouter. Son instabilité psychomotrice pouvait gêner la compréhension de ses suggestions pertinentes, mais elle n’affectait pas la grande écoute qu’il avait de ce qui était dit. Parfois, je retrouvais sur son visage l’expression qu’il avait au moment de la rencontre avec Hélène Gratiot-Alphandéry.

 

Je suis restée à la MSH et j’ai assisté à presque tous les séminaires du mardi. Je m’y sentais relativement bien. Relativement, parce que tous les participants, étudiants et collègues de Pierre avaient, me semble-t-il, peur de son intelligence. Certains lui tressaient des couronnes : « il faudrait attendre Pierre » ou : « je voudrais savoir ce que Pierre en pense ! » ou encore : « Pierre est à Genève. Il nous demande de travailler sans lui ! » Cette vénération m’a toujours beaucoup agacée. Il était évident que personne ne comprenait toutes ses remarques. Comme il était très exigeant, très sévère, quelques uns d’entre nous tremblaient un peu, il est vrai, quand ils devaient présenter leur projet de D.E.A ou de thèse. Gréco n’aimait pas cela, il en était gêné.

 

C’est en mai 1976 seulement que j’ai réellement pris conscience de son intelligence. Son jugement m’étant désormais apparu très fiable, je lui ai remis un texte que Vergnaud m’avait recommandé de soumettre à Bärbel Inhelder. Pierre a lu le texte alors que je n’étais pas son étudiante puis il m’a convoquée un lundi après-midi. Ce jour-là, il était en conversation avec Bresson. Il a mis au moins une demi-heure avant de me faire entrer dans son bureau. Debout dans son pardessus bleu, affichant un masque très sévère, il a descendu mon papier, point par point, avec talent : « Annie, j’ai des choses très désagréables à te dire. Ton texte est très mauvais, c’est émietté, c’est mal écrit, tu as foutu trop de Piaget là-dedans, tu n’as pas choisi les bons auteurs, etc. » J’ai écouté sans broncher, mais avant que je sorte, il a demandé quelque peu inquiet : « Dis Annie, tu me remettras la correction ?»

C’était lui le plus malheureux des deux. Il m’aimait bien et ce papier l’avait déçu. Moi, je trouvais ses critiques fort justes ; il m’avait préparé des textes à lire, c’était très gentil. Je suis sortie de son bureau peinée, avec une très mauvaise image de moi, mais avec la conviction d’avoir fait un bond inespéré dans la connaissance. Je n’avais et n’ai jamais rencontré quelqu’un qui sache lire comme lui et dénoncer les erreurs avec la limpidité propre à un savoir parfaitement dominé. J’ai refait le texte en huit jours. Il a été très content et moi aussi. C’est ainsi que notre amitié a vraiment commencé et c’est à cette occasion seulement que j’ai découvert cette chose rare qu’il possédait et que tout le monde lui reconnaissait, une intelligence hors du commun. A ma décharge, je préciserai qu’il ne parlait pas des travaux qu’il avait menés à Genève. Il ne se citait jamais. J’ose affirmer que cette coutume n’était pas (et n’est toujours pas) très répandue chez les universitaires. La preuve, une de ses collègues, Directrice d’Etudes à la MSH, qui prenait grand soin de laisser la porte de son bureau ouverte pour clamer qu’elle était publiée dans : « Child Development ». Une étudiante, en fin de thèse et en mal d’identification, ne cessait de répéter avec emphase : « G. est chez les américains ! G., elle est chez les Américains ! » Il est vrai que ce n’était pas encore monnaie (presque) courante. A bien y réfléchir, je crois que Pierre faisait tout de même allusion à des recherches qu’il conduisait sur le hasard, mais sans jamais préciser où étaient publiés ses textes.

A partir du moment où il m’a rendu ce très mauvais papier, je me suis plongée dans ses écrits et je ne les ai plus quittés. Les textes qui m’ont le plus formée sont « La logique des apprentissages (1959) », « Recherche sur quelques inférences arithmétique (1960) », « Quantité et quotité (1962 a) », « La commutativité de l’addition (1962 b) ». Quand j’écris, je ne cesse d’ouvrir ses ouvrages pour deux raisons au moins. La première pour l’interprétation très fine des réponses d’enfants, la seconde pour le style. Je trouve que Pierre écrit très bien et j’essaie de m’inspirer de sa manière d’enchaîner les idées et de son choix de mots malicieux. En outre, à travers les textes que j’ai cités, il se révèle un expérimentateur ingénieux et drôle à la fois. Il est parfois un peu bavard, mais quel talent ! Il disait souvent : « Tu sais, écrire c’est difficile, c’est très difficile». Effectivement, écrire est difficile, et écrire comme lui est très difficile.

 

Très grand psychologue, il a marqué son époque tout en restant méconnu. Modeste, il n’a rien fait pour que ses écrits soient traduits. Ses précieuses études resteront uniquement connues des initiés. Je parierai qu’il y avait pensé. Bien qu’il ne m’ait jamais enseigné Piaget, lui seul m’a appris à être un peu piagétitienne. Il passait des lumières qui éclairaient les grands ouvrages. Les critiques qu’il adressait à la théorie piagétienne m’ont également profondément marquée. Si quelqu’un en France connaissait l’œuvre de Piaget, c’était lui ; si quelqu’un en connaissait les faiblesses, c’était lui.

J’ai moins suivi la dernière période. Dans la préface qu’il a faite à l’ouvrage de Jacqueline Bideaud : Logique et Bricolage (1988), il m’a semblé qu’en accordant une place importante aux représentations et à la sémiologie, il ralliait un phénomène de mode, mais je me trompe peut-être.

 

J’ai également travaillé avec acharnement ses textes épistémologiques lorsque j’ai préparé mon audition à Paris V, je me suis plongée dans « Piaget ou l’épistémologie nécessaire (1966) » et « L’épistémologie de la psychologie (1967) ».  M’étant imprégnée de ces deux écrits relativement difficiles, j’ai peaufiné ma prestation. Avant l’audition, il m’avait chaleureusement encouragée : « Tu peux y aller, étant donné le niveau, t’as peut-être des chances ! » Le soir même de l’audition, Vergnaud m’a appelée pour me dire que j’étais élue, j’ai aussitôt contacté Pierre pour le remercier :

 

« Je te dois tout », lui ai-je crié. Il a répondu : « Tais-toi, est-ce que tu te rends compte que tu vas me faire rougir au téléphone ! ». Il semblait très heureux pour moi. Je lui ai rapidement expliqué que ses textes m’avaient bien inspirée. Après quoi, est venu son au revoir à la ‘Gainsbourg’: « Je t’embrasse » ai-je dit, et il a rétorqué  brièvement : « Moi, non plus ! »

 

A dire vrai, je lui dois presque tout seulement, car je dois aussi à Gérard Vergnaud. Pierre était très orthodoxe, il laissait moins d’initiative à l’étudiant que Gérard. J’ai eu la chance de pouvoir côtoyer l’un et l’autre. C’est un gros avantage.

J’ai soutenu ma thèse le 10 février 1984, longtemps après l’époque des séminaires[1]. Pierre était dans mon jury, il avait demandé à en faire partie. Pour rien au monde je n’aurais souhaité voir quelqu’un d’autre que lui. Il y avait, bien sûr, Gérard[2] et le Président était Jean-François Le Ny. Pierre a été très critique sur la théorie, je n’ai pas compris toutes ses remarques parce que sa pensée n’était pas toujours facile à suivre, et encore moins le jour de la soutenance. Ma fille était dans la salle, elle avait 12 ans et m’a glissé à l’oreille : « Il est impressionnant, ce monsieur ! » Elle avait probablement eu l’intuition de quelque chose de rare en lui. Il a été extrêmement attentif comme il pouvait l’être parfois. A la fin de la soutenance, il est venu vers moi en disant : « Annie, je vais te faire un cadeau ». Il a sorti un crayon papier de couleur noire, que j’ai toujours, mais il est tout petit, avec l’inscription "MSH". Par contre, il était triste de voir que je n’allais pas bien, et moi j’étais triste de voir que lui n’était pas bien. Il n’était pas encore vraiment malade, il était très pâle, on sentait quelqu’un qui se dirigeait vers un douloureux avenir et qui le pressentait. Mais, nous étions, je crois, très heureux de nous retrouver.

 

Quand on fait l’éloge de Pierre, on fait bien sûr l’éloge de sa brillance intellectuelle et de sa redoutable intelligence. Mais on ne mentionne pas assez son intégrité. Tout au contraire, on l’a souvent accusé à tort de partialité. Or, il arrivait à séparer le jugement de l’affect, ce qui est très coûteux. On a très mal compris cette rare prouesse, ce qui n’est guère étonnant. Il en a été peiné toute sa vie. Je l’ai vu bouleversé à la sortie d’une thèse dirigée par Bresson. Il avait était traité de juge partisan. Il s’était senti trahi par les siens, par ceux pour lesquels il avait de l’estime. En ces instants, il devenait blême et totalement muet.

 

Mais ce Directeur d’Etudes hors normes n’avait pas que des qualités, loin s’en faut. Et ce sont bien ses défauts qui m’ont gênée lors de notre première et brève rencontre. Tout le monde le trouvait bavard. Ce bavardage parfois intempestif faisait de sa pensée un méandre et ses interminables digressions finissaient par lasser. Je me souviens d’une présentation de recherches en 1976, rue Gay-Lussac. Des jeunes « poulains » de Bärbel Inhelder, Alex Blanchet et Edith Ackermann, étaient venus exposer leurs travaux sur le « sujet réel », les procédures, etc. Ils n’ont pas pu en rendre compte. Gréco les a interrompus sans cesse, il allait contre ce courant, je pense qu’il avait raison, mais il aurait dû les laisser parler. Cette nouvelle orientation lui paraissait erronée pour maintes raisons qui sont exposées dans un de ses derniers textes « Réduction et construction (1985) ». Bref, Pierre était un bavard impénitent. Ainsi, lors des symposia qui se tenaient à Genève, Piaget sortait, parait-il, sa montre quand Gréco prenait la parole en lui disant : « Gréco, vous vous rappellerez que vous devez vous arrêter à l’heure prescrite».

Il pouvait également être très discourtois. C’était relativement rare, mais je l’ai vu à deux ou trois occasions être franchement odieux.

 

Un jour, une jeune femme frappe à sa porte, ouvre et demande : « Monsieur Gréco, je voudrais faire une recherche sur l’astrologie en utili… » Elle n’a pas eu le temps d’achever sa phrase. Il s’est mis dans une colère noire, a tapé du pied et lui a jeté au visage que le métier de chercheur était un vrai métier qui n’avait rien à voir avec cette foutaise d’astrologie. L’apprentie astrologue est sortie furieuse en disant très fort qu’elle ne remettrait plus jamais les pieds dans cette Maison des Sciences de l’Homme et qu’un « Hoo-mm-me » de cette qualité ne devrait pas travailler dans une institution d’un tel renom – A-t-elle compris que l’hoo-mm-me qui débitait des tirades pour la foutre dehors était un natif du cancer ? Pas sûr.

 

Lors des critiques qu’il nous adressait dans les séminaires, il pouvait être désagréable mais jamais aussi brutal. Il manifestait presque toujours une lucidité implacable à l’égard de nos travaux. A l’écoute d’un exposé, il attendait un moment, il amorçait une discussion, et le jugement tombait. Parfois, il restait totalement silencieux, signe manifeste d’une admiration secrète. Il est rare qu’il se soit trompé sauf pour quelques étudiants très intelligents mais fragiles psychologiquement. Il manifestait à leur endroit une certaine cécité. C’est de mon point de vue la seule raison valable qui peut expliquer la méconnaissance de son intégrité.

 

 

Je voudrais maintenant évoquer quelques rencontres amicales et spontanées que Pierre Gréco nous accordait. Je noterai au passage un ou deux jugements qu’il inspirait à certains de ses collègues. Cest le seul homme que j’ai fréquenté qui pouvait écouter attentivement la présentation d’un travail lors d’un colloque tout en griffonnant une blague à un participant. Il continuait à écouter et à critiquer pertinemment l’orateur en savourant quelques énigmes de l’Album de la Comtesse retournées par l’heureux destinataire.

Il n’avait guère besoin de support écrit pour faire une communication. En 1979, au Congrès international de Psychologie de l’Enfant, il a présenté quelque chose d’assez conséquent et vivant à partir d’un petit papier qu’il a sorti de sa poche. Je lui ai posé une question déplacée : « C’est ça, ta communication ? » Il est resté silencieux. Je suppose que ces cinq lignes pensées étaient le fruit de plusieurs nuits blanches. Il s’agissait, me semble-t-il, de la représentation que l’on peut avoir des petits nombres, représentation plus proche de celle des grands nombres que de celle des bûchettes : « Quand un adulte dit 5 ou 7, il ne voit jamais 5 ou 7 éléments discrets, etc.,»

La brillance et la puissance de sa pensée ont suscité bien des jalousies tout au long de sa carrière. Quand je suis entrée dans le département des Sciences de l’Education de Paris V, j’ai rencontré Georges Snyders qui disait de Gréco une seule chose : « Brillant ». Selon lui, Pierre avait été reçu premier à l’agrégation simplement à cause de son oral. De la même façon, René Zazzo[3], avec lequel j’avais commencé un D.E.A., m’a demandé, très mesquin : « Et alors, vous travaillez avec Pierre Gréco, et vous arrivez à placer un mot ! » Pire, au moment de la mort de Pierre, j’avais rédigé un petit texte en son hommage ; je l’ai envoyé à Zazzo qui aussitôt m’a répondu : « C’est entendu, ce texte est bon, je le fais paraître dans Enfance». Le temps passant et le texte n’étant toujours pas publié, j’ai rencontré Zazzo qui m’a annoncé sans le moindre scrupule : « Ah, on ne va pas passer son temps à ériger une statue à Gréco, quand même ! » J’étais sidérée. Je lui en ai gardé rancune longtemps. Je l’avais tant admiré pour son cours de haute volée, et je découvrais brutalement un homme relativement médiocre. Je me consolais en pensant que j’avais eu la chance de travailler avec Pierre qui n’avait certes pas les ficelles du métier de pédagogue (et qui le savait), mais qui ne jalousait personne. Profond dans ses affections, consciencieux dans sa direction d’études, il admirait les uns et ne s’embarrassait guère de la médiocrité des autres.

 

On s’aimait beaucoup, on se respectait. J’avais bien sûr une grande admiration pour son intelligence. Je regrette de ne pas lui avoir posé beaucoup plus de questions parce qu’il m’intimidait alors même que je le sentais proche. Il me parlait de ses dadas, des petites bêtises de la vie. Malgré sa modestie, son intelligence redoutable me laissait toujours un peu craintive dans nos échanges. Or, il était prêt à répondre à toutes mes questions. Comme j’ai été sotte de ne pas saisir toutes les chances qu’il m’offrait de pouvoir progresser à ses côtés.

Et puis, nous fréquentions les cafés, les restaurants, les trottoirs du Boulevard Raspail où il nous saluait presque toujours joyeusement : « La vie est belle ? », et il ajoutait : « Moi, je ne suis pas en forme, je suis complètement gaga ! » Un jour, sortant de la Maison des Sciences de l’Homme, nous parlions de l’apprentissage précoce de la lecture. Pierre nous a raconté comment il avait appris à lire. Son grand-père le prenait sur ses genoux depuis l’âge de trois ans et lui lisait tous les jours quelques passages de la Bible en suivant chaque mot avec son doigt. A quatre ans, il savait lire la Bible, par simple imitation, à force de d’associations répétées[4] . Tout avait été assimilé. Je note cela pour rappeler que c’est un excellent moyen d’apprendre à lire aux enfants avec un livre d’apprentissage sans doute un peu moins ardu que celui de Pierre. Je le note aussi pour établir une filiation entre la Bible de ses quatre ans et sa lecture de la Bible dans sa retraite de la rue Monge. Croyance intime profondément enracinée, soigneusement tenue au secret jusqu’à son décès. Mais, à travers toutes nos rencontres amicales, il m’a semblé être seul. Enigmatique Pierre ! Très entouré socialement. Affectivement, très proche de sa fille et de sa femme, et néanmoins porteur d’une profonde solitude.

 

Pierre est mort le 30 novembre 1988. Les souvenirs les plus vibrants que j’ai de lui sont attachés aux restaurants italiens, aux rares repas à domicile et aux sempiternels couloirs du métro. « Adieu Ma Belle », disait-il, au moment où l’on se quittait. Au fond, je ne suis pas sûre que cela ne soit pas l’essentiel de notre amitié : un regard qui s’allume, une sacoche qui s’accroche sur un dos qui se voûte, et qui s’éloigne sur les quais du métro.

 

A.C.B.

 

 

Bibliographie

 

(1959). Induction, déduction et apprentissage. Goustard M., Gréco P., Matalon B., Piaget J. (eds), La logique des apprentissages, Paris: P.U.F. (EEG, 10).

(1960). Recherches sur quelques formes d’inférences arithmétiques et sur la compréhension de l’itération numérique chez l’enfant. Gréco P., Grize J.B., Papert S., Piaget J., Problèmes de la construction du nombre, Paris: P.U.F. (EEG, 11).

(1962a). Quantité et quotité. Nouvelles recherches sur la correspondance terme à terme et la conservation des ensembles. Gréco P., Morf A., Structures numériques élémentaires, Paris : P.U.F. (EEG, 13).

(1962b). Une recherche sur la commutativité de l’addition. Gréco P., Morf. A., Structures numériques élémentaires, Paris: P.U.F. (EEG, 13).

(1966). Piaget ou l’épistémologie nécessaire. Collectif Psychologie et épistémologie génétique : thèmes piagétiens, Paris: Dunod.

(1967). Epistémologie de la psychologie. Piaget J. (ed.), Logique et connaissance scientifique, Paris : Gallimard (Encyclopédie de la Pléiade).Piaget, Paris: Delachaux et Niestlé.

(1985). Réduction et construction, Archives de psychologie, 53, 21-35.

(1988). Préface à Bideaud J., Logique et bricolage chez l’enfant. Lille : P.U.L.

(1990). Hommage à Pierre Gréco, Archives de Psychologie, Vol. 58, N° 225, Genève : Editions Médecine et hygiène.

(1991). Structures et Significations, Paris : éditions de l'E.H.E.S.S. (principaux textes de Pierre Gréco réunis, après sa mort le 30.11.88, par Bassano, D., Champaud, C., Le Halle, H., Marlot, C.).

(2008) Ecrits en hommage à Pierre Gréco – Un psychologue dans le 20ème siècle (1927-1988). Portrait polyphonique coordonné par Daniel Gilis. Lyon : Aléas



[1] Entre 1980 et 1984, j’ai cessé de suivre les séminaires pour des raisons de santé.

[2]  Gérard a eu la très grande gentillesse de venir me chercher et de me porter dans ses bras le jour de la soutenance de ma thèse.

[3] René Zazzo possédait un talent de pédagogue rarissime. Je lui dois mon goût profond pour la psychologie du développement; je lui en suis et serai toujours reconnaissante.

[4] La lecture est un savoir-faire qui peut s’apprendre par les associations : stimuli-réponses ; ce qui n’est pas le cas, par exemple, un vrai nombre ou un système de classes, etc.



02/12/2011
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